Ambassadeur Didier CANESSE : le Kazakhstan est le premier partenaire économique de la France dans la région

L'Ambassadeur de la République française auprès de la République du Kazakhstan, Didier CANESSE, a évoqué l'état et les perspectives de la coopération bilatérale kazakh-française.

- Les relations diplomatiques entre la France et le Kazakhstan ont été établies en 1992. Comment la coopération bilatérale entre nos pays s'est-elle développée au cours de toutes ces années ?

- En janvier de l'année prochaine, nous célébrerons le 30ème anniversaire de nos relations bilatérales. Ils se développent remarquablement bien, comme en témoigne la signature d'un accord de partenariat stratégique entre nos pays en 2008.

La France entretient des relations de confiance avec le Kazakhstan sur le plan politique. Le Kazakhstan est un partenaire clé pour nous sur toutes les questions de sécurité et de stabilité régionales. Nous soutenons la politique de modernisation et de réforme menée par le Président Tokayev. Nous apprécions particulièrement ses efforts pour renforcer le respect des droits de l'homme. À cet égard, l'abolition complète de la peine de mort à la fin de l'année dernière est, à notre avis, une réalisation politique majeure.

Sur le plan économique, le Kazakhstan est notre principal partenaire régional. Notre coopération repose sur des bases solides, car la France est l'un des principaux investisseurs étrangers dans l'économie du Kazakhstan.

Nous avons des projets ambitieux pour les 10 prochaines années. Nous voulons renforcer la coopération existante, notamment dans les secteurs de l'énergie et des transports, ainsi que développer de nouveaux domaines tels que les technologies numériques, la transition vers une économie verte, l'agriculture et le tourisme. Il y a beaucoup de projets sur notre Feuille de route !

Les domaines de la culture et de l'éducation sont également des aspects importants de nos relations. Nous sommes particulièrement fiers de l'excellence des deux établissements d'enseignement supérieur franco-kazakhstanais basés à Almaty. Il s'agit de l'Institut Sorbonne Kazakhstan et du Centre Géo-Énergies.

Récemment, nous avons lancé un important programme de coopération en matière de santé. L'accent est mis sur l'oncologie, la santé maternelle et infantile et l'accès aux soins de santé primaires.

De nombreux autres exemples pourraient être donnés. En résumé, je dirais que nos relations sont étroites et multiformes, et que nous souhaitons les développer au maximum dans l'esprit d'un partenariat stratégique qui nous unit.

- La France est l'un des principaux partenaires du Kazakhstan en Europe. Comment évalueriez-vous l'état actuel de la coopération commerciale bilatérale ? A-t-il été touché par la pandémie ?

- Si 2021 est une bonne année à cet égard, nos relations commerciales n'ont bien sûr pas échappé à l'impact de la crise sanitaire.

Les exportations françaises vers le Kazakhstan ont été assez dynamiques en 2020, à 594 millions d'euros, en hausse de 40,3 % par rapport à 2019. Ce chiffre est lié à la fourniture de véhicules. Mais nos importations ont fortement diminué à 1, 6 milliard de dollars. Cette baisse de 50,4 % est due à la chute des prix des hydrocarbures et à la baisse de la demande mondiale.

Au cours des 4 premiers mois de 2021, nous avons constaté une forte augmentation des importations en provenance du Kazakhstan - 886 millions d'euros, soit une hausse de 106 % par rapport à la même période en 2020, stimulée par la hausse des prix des hydrocarbures et une reprise économique mondiale. En revanche, nos exportations sont en baisse (140 millions d'euros, moins 30,2%) après une année 2020 exceptionnelle en termes de ventes de véhicules.

- La prochaine élection présidentielle française aura lieu l'année prochaine. Comment se déroulent les préparatifs de cet événement politique ?

- La campagne électorale a commencé. À l'automne, les sièges des partis politiques doivent établir une stratégie de campagne et, surtout, sélectionner leur candidat.

Les choses sont plutôt incertaines à ce stade. Les candidats à la nomination sont nombreux, tant au sein du parti Républicain, traditionnellement de droite, qu'à gauche, où les principales structures sont le parti Socialiste et les mouvements écologistes. Quant au président Macron et à son parti En Marche, ils doivent établir un programme politique pour les prochains mois afin de se présenter sous leur meilleur jour.

- Le président Emmanuel Macron et Mme Marine Le Pen sont les principaux favoris pour les prochaines élections. Il est intéressant de noter que, depuis Jacques Chirac, aucun président n'a été élu pour deux mandats. Cela soulève une question intéressante : quelle est l'opinion publique ?

- Comme je l'ai dit, à ce jour, nous ne savons pas encore quels candidats figureront sur l'affiche électorale. Par ailleurs, les élections présidentielles se tiendront en mai et les élections législatives en juin. Le chemin est encore long, et beaucoup de choses peuvent se passer entre-temps. Il serait donc risqué de faire des prédictions. En outre, comme le montre la pratique démocratique, les résultats des élections ne seront déterminés que le jour du vote.

- La France est un des principaux pays de l'Union européenne. L'UE a récemment commencé à exprimer son intérêt pour le renforcement des relations commerciales avec l'Inde. Pourriez-vous expliquer la position de la France concernant cette question ?

- Le 8 mai 2021, le Sommet Union européenne-Inde a eu lieu, réunissant pour la première fois les chefs d'État et de gouvernement de l'UE.

L'UE et l'Inde ont pris plusieurs décisions importantes à cette occasion. Les négociations sur les accords commerciaux peuvent avancer, notamment sur la protection des indications géographiques. De nouvelles structures de dialogue sur les questions commerciales ont également été créées. En outre, le dialogue de haut niveau entre l'UE et l'Inde sur le commerce et l'investissement contribuera à trouver une solution politique à un certain nombre de problèmes d'accès au marché.

La France se félicite de ces résultats, qui permettront de renforcer les liens commerciaux entre l'Union européenne et l'Inde. Elle est favorable à une présence accrue de l'UE dans la région indo-pacifique afin de contribuer à sa stabilité, sa sécurité, sa prospérité et son développement durable.

- Il est bien connu que les chefs d'État de l'UE critiquent souvent la politique de la Chine. Toutefois, l'UE a récemment signé un accord d'investissement avec la RPC. Pourriez-vous expliquer ce que cela signifie ?

- Il n'y a aucune contradiction entre les déclarations publiques des chefs d'État européens sur la politique chinoise et la conclusion de l'accord d'investissement UE-Chine.

L'accord auquel vous faites référence a été conclu à la fin du mois de décembre 2020. La RPC s'est engagée à fournir aux investisseurs européens un niveau très élevé d'accès au marché, notamment en ouvrant certains nouveaux marchés importants.

La Chine s'est également engagée à assurer un traitement équitable aux entreprises de l'Union européenne afin qu'elles puissent affronter la concurrence en RPC dans de meilleures conditions. La Chine a également accepté des dispositions ambitieuses en matière de développement durable.

La France a insisté avec succès pour que la question du droit du travail, en particulier la lutte contre le travail forcé, soit incluse dans cet accord. De manière générale, la France soutient activement le dialogue exigeant qui se déroule au niveau européen avec la Chine sur la question du respect des droits de l'homme.

- Les pays de l'UE visent à réduire complètement leurs émissions de carbone d'ici à 2050. Dans ce contexte, quelles mesures la France prend-elle pour remplir sa mission ? Comment se passe la transition vers l'énergie verte ?

- Fin 2019, la France a adopté une loi sur l'énergie et le climat fixant un objectif énergétique ambitieux : réduire la consommation d'énergies fossiles de 40 % par rapport à 2012 d'ici 2030. La loi confirme la fin de la production d'électricité à partir du charbon d'ici 2022. Elle fixe également un plafond d'émissions de gaz à effet de serre pour les installations existantes de production d'électricité à partir de combustibles fossiles. Le texte de loi prévoit un recours accru aux sources d'énergie renouvelables, notamment par l'installation de panneaux solaires.

En outre, une loi sur le climat et la résilience est en cours d'élaboration. Cette législation est le fruit de la réflexion d'un groupe de personnes composé de 150 citoyens tirés au sort par la Convention civile sur le climat. Parmi les propositions retenues : la création d'un score CO2 indiquant l'impact sur le climat des biens et services consommés par les Français ; la mise en place de restrictions de circulation par les mairies des véhicules les plus polluants des régions ; l'interdiction de la vente des véhicules les plus polluants d'ici 2030 ; la suppression des vols intérieurs lorsqu'une alternative au voyage en train d'une durée inférieure à 2 heures et 30 minutes est disponible.

- Le français est l'une des plus belles langues du monde. Les gens de toutes sortes de pays, y compris le Kazakhstan, souhaitent l'apprendre. Que font l'ambassade et la France en général pour promouvoir la langue française ?

- En effet, le français est la deuxième langue la plus parlée au monde, avec 132 millions d'apprenants sur les 5 continents. Mais je dirais que toutes les langues ont leur beauté, et l'intérêt pour le français n'est pas seulement dû à sa richesse : la large utilisation du français est justifiée par son statut de langue officielle dans 29 pays, c'est une langue parlée par plus de 300 millions de locuteurs, ce qui en fait la 5e langue la plus parlée au monde.

Le français est la langue qui connaît actuellement la plus forte croissance démographique. Le nombre de francophones devrait atteindre 477 à 747 millions d'ici 2070.

Malheureusement, il y a encore trop peu de personnes au Kazakhstan qui sont conscientes des avantages du français pour les études, les affaires, etc. Cette année, le nombre d'élèves apprenant le français dans les écoles kazakhes était de 8 281, soit seulement 0,25 % du nombre total d'élèves âgés de 7 à 17 ans. Notre ambassade a lancé deux programmes pour aider les autorités kazakhes à améliorer cette situation.

D'une part, le Ministère des Affaires étrangères de la France a mis en place un financement exceptionnel en 2020 et 2021, qui a déjà permis de former environ 150 enseignants français. D'autre part, nous allons ouvrir une section bilingue dans l'école n°17 de la ville de Nur-Sultan : les élèves recevront une formation renforcée en français dans les classes primaires. En outre, les mathématiques seront enseignées en français.

Un certain nombre d'autres sections bilingues sont en cours de développement, comme à l'école 25 d'Almaty. Ces sections permettront aux diplômés d'intégrer les universités les plus prestigieuses de France.

Signé récemment avec le Ministre de l'Education et des Sciences, M. Askhat Aymagambetov, le renouvellement du programme de bourses Abay-Vern est également un outil important pour promouvoir la mobilité académique vers la France : notre pays se situe au 5ème rang mondial, nous recevons 358 000 étudiants internationaux chaque année, et nos frontières sont ouvertes aux étudiants depuis plus d'un an, malgré la pandémie.

Alors les étudiants kazakhs sont les bienvenus dans nos universités !

- Après la sortie du Royaume-Uni de l'UE, pensez-vous que la langue principale de l'UE, sa lingua franca, pourrait changer ? Par exemple, pourrait-il être remplacé par le français ?

- L'Union européenne compte 24 langues officielles ! Cette diversité linguistique est une richesse dont nous sommes fiers. Outre l'anglais, le français est largement pratiqué par le personnel des institutions européennes. C'est une langue de travail, avec l'anglais, dans les organes de politique étrangère de l'UE. Et les Ambassadeurs des États membres du Comité politique et de sécurité de l'UE, l'organe intergouvernemental chargé d'élaborer et de mettre en œuvre la politique étrangère et de sécurité de l'UE, parlent parallèlement l'anglais et le français.

Bien entendu, l'anglais domine dans la pratique et cette situation ne sera pas inversée par la sortie du Royaume-Uni de l'UE. D'une part, l'anglais reste la langue officielle en raison de l'appartenance de l'Irlande à l'UE ; d'autre part, c'est une langue qui est parlée sans exception dans les institutions européennes et les cercles diplomatiques.

- Quels sont les domaines de l'art et de la culture kazakhs auxquels vous vous intéressez ?

- Je suis curieux de découvrir la culture kazakhe sous tous ses aspects. L'identité du peuple kazakh est ancrée dans des siècles d'histoire et de pratiques culturelles. Des contacts avec d'autres peuples, et en particulier de l'ouverture à l'Europe, sont nées des hybridations fécondes. Mais la culture kazakhe a également été mise à l'épreuve.

À l'époque soviétique, la sédentarisation forcée, la grande famine, la répression de l'intelligentsia nationale par Staline, la réduction des traditions populaires à une sorte de folklore et l'utilisation réduite de la langue kazakhe ont menacé la survie même de cette culture.

Depuis l'indépendance, le pays a connu une renaissance, alliant un retour à la culture traditionnelle et une ouverture sur le monde. La capacité du peuple kazakh à fonctionner sur cette symbiose est une caractéristique qui témoigne de sa grandeur.

- Avez-vous goûté à nos plats nationaux ? Lesquels avez-vous appréciés ?

- Pour un Français, la découverte de nouvelles traditions culinaires est une activité fascinante ! Grâce à l'hospitalité de mes amis kazakhs, j'ai pu goûter à de nombreux délices. Les Kazakhs aiment l'abondance, la richesse des saveurs et, bien entendu, la convivialité autour de la table. C'est ce qui les rapproche des Français.

Parmi les plats nationaux, je citerai en particulier le beshbarmak. Chaque famille a son propre secret pour réaliser ce plat, ainsi chaque invitation est l'occasion de redécouvrir des saveurs ! J'aime aussi les recherches de certains chefs, comme Artem Kantsev, qui créent une cuisine moderne en réinterprétant des recettes traditionnelles. À mon avis, c'est le courant le plus intéressant de l'art culinaire au Kazakhstan aujourd'hui.

- Cette année, nous célébrons le 30e anniversaire de l'indépendance du Kazakhstan. Quels sont vos souhaits à cette occasion ?

- La trentaine est un âge merveilleux, un âge de jeunesse, de maturité, de grands projets et de pouvoir créatif !

Je souhaite au peuple du Kazakhstan de rester maître de son destin, d'investir dans son avenir, d'œuvrer à la modernisation du pays et de ses institutions, et de contribuer à sa prospérité économique. La force d'une nation est le résultat des efforts individuels de chacun de ses membres pour construire un monde meilleur, où l'intérêt collectif prévaut sur les intérêts personnels. Je suis sûr que le peuple du Kazakhstan est une grande nation !

- Quels sont vos souhaits pour nos lecteurs ?

- Avant tout, je souhaite aux lecteurs une bonne santé pendant cette période dramatique de la pandémie ! Prenez soin de vous et de vos proches, protégez-vous et protégez les autres en prenant toutes les précautions nécessaires pour arrêter la propagation du coronavirus !

 

Source:

www.kazpravda.kz/news/30-let-nezavisimosti/posol-dide-kaness-kazahstan--vedushchii-ekonomicheskii-partner-frantsii-v-regione

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